Donnerstag, Januar 12, 2017


"Le Seigneur nous donne des ailes
Il nous donne un estomac
nous pouvons voler ou vomir
nous offrir à la gloire
marcher sur l'eau
tirer une tasse d'épines
nous retourner comme des gants
et la somme de nous
vaciller
juste un peu de poussière, presque invisible
mais elle sécrète une substance.
Le rêve immortel..."
PATTI SMITH: Glaneurs de rêves. [Paris] : Gallimard, 2016. (Folio ; 6124), 85-87


Bild: Hugo Keller
Patti Smith, Zürich, X-tra, 28.06.2007

"Mon arrière--grand-mère m'avait prise en grippe, comme elle avait pris en grippe ma mère avant moi. Pourtant, je lui ressemblais pas mal, car je ressemblais à ses fils, et je partageais certains de ses traits et son caractère réservé. Elle était issue d'une longue lignée de paysans et de bergers solitaires de Norfolk. Ils étaient dans son sang, qui coulait aussi dans le mien. J'étais consciente, même quand elle me rabrouait, qu'à travers elle je possédais l'âme de la bergère. Â travers elle j'étais attirée par la vie des rêveurs, et je m'imaginais surveillant un troupeau, récoltant la laine dans une sacoche de cuir, et contemplant les nuages. Le destin a voulu que je suive un chemin fort éloigné de celui de mes ancêtres, et pourtant leurs façons étaient aussi les miennes. Et dans mes voyages, lorsque je vois une colline constellée de moutons ou une équipe d'ouvriers agricoles qui se reposent à l'ombre des noisetiers, je suis prise d'un désir nostalgique de redevenir celle que je n'ai pas été."
Ebd., 85-86